Comparatif Mobilité du 22 Septembre 2023 – Point de vue de la moto

Top départ ! Le comparatif de mobilité organisé par la FFMC 69 de ce vendredi à 17h, a commencé. L’objectif ? Partir d’un point de stationnement autorisé dans les alentours de la place Bellecour, pour rejoindre le parking du centre commercial Ecully Grand-Ouest.

Une voiture, un scooter, un piéton utilisant les TCL et un cycliste seront mes concurrents.

Je m’appelle Duckesse, je suis une moto.

Dans mes starting-blocks, je patiente. La circulation semble moyennement dense en ce vendredi pluvieux. Stationnée rue de la Barre, sur un emplacement Moto, je discute de la pluie et du beau temps avec mon voisin scooter. Surtout de la pluie à vrai dire, vu la couverture nuageuse d’aujourd’hui. Cela fait un peu plus d’une minute que le top départ à été donné, quand je vois arriver en marchant mon motard, casque à la main, à l’angle de la place Bellecour. Peut-être ne prend-t-il pas ce comparatif pour une course ? Peut-être souhaite-t-il laisser à ses opposants un sentiment de victoire et leur damer le pion au dernier moment ? En tout cas il ne court pas, ni ne se met en danger pour traverser. Arrivé à mon niveau, là encore il prend le temps et me parle : « prête ? Attends, il faut que je fasse une photo de ton compteur pour avoir une idée de la distance. Et aussi que je branche le téléphone, l’application de suivi consomme un peu de batterie et il faut que l’on sache ou je me trouve ! » Mais quelle pipelette ! Enfin il se décide à m’enjamber, la clef est insérée, mon moteur s’ébroue dans un ronflement rauque : il est temps d’y aller.

L’insertion dans la circulation se fait avec sourire et politesse. « Merci » lance t’il à cet automobiliste qui l’a laissé se lancer dans le tumulte des voitures. Et tout de suite, un feu au loin. Prudemment, nous remontons la file de 5 voitures par la gauche, en bordure de voie avant de nous arrêter en première position. Le départ risque d’être un peu tendu puisqu’à ce moment, les deux voies de circulation se croisent pour aller tout droit : Le taxi de gauche va sur la file de droite et la voiture de droite voudra aller sur la file de gauche.

Figure 1 : Croisement des deux voies de circulation

Feu vert, Longue vie à la moto ! Nous laissons le taxi avancer et prendre sa voie, avant de nous enquiller sur notre voie bien à nous, derrière 2 voitures. Les feux s’alternent rouge/vert, les 2 tonnes du SUV de devant peinent à s’élancer tandis que mes 265kg (C’est un poids léger mon motard) glissent sur la route comme une feuille sur un ruisseau. Nous arrivons Rue du Colonel Chambonnet, les deux voitures que je suis prennent la voie de droite tandis que nous collons à la ligne d’effet des feux sur la voie de gauche : Enfin un départ en Pôle !

Je piaffe d’impatience, entouré des drapeaux gallois des supporters de Rugby. Mon propriétaire se plaint des 4 dernières minutes ou nous avons parcouru 600m. Si seulement il savait ce que nous réserve la suite…

Feu vert ! une impulsion de gaz aura suffi à laisser le SUV sur place. Nous arrivons au carrefour du Quai Tilsitt : l’avant dernière ligne droite avant le tunnel sous Fourvière, mais aussi ma vision de l’horreur ! Un bouchon ! Non, pas un restaurant typique Lyonnais, je parle ici de la circulation. Disons que l’un dans l’autre, on va manger. L’entrée sur le Quai Tilsitt m’est facilitée : la voie de bus sur la gauche, partagée entre les transports en communs et les modes doux, est vide. Toutefois, la queue pour franchir le feu à l’angle du quai et de la rue Antoine de Saint-Exupéry est assez longue. Qu’à cela ne tienne, je suis douce, belle et agile. Nous remontons la file de voiture en sécurité, sur la gauche de cette voie TC, avant de patienter gentiment au feu aux côtés d’une camionnette. Au devant, mon phare saigne de voir la succession de phares rouges, des dizaines, représentant chacun une voiture qui redescend le quai en direction du pont Kitchener. Le quai Tilsitt est, depuis l’été 2023, « provisoirement » séparé en deux voies par un muret central, Mesure prise suite à de très tragiques accidents survenus en 2022. Les voies sont donc séparées afin de permettre de mixer plusieurs modes de déplacements et d’offrir des voies plus sécurisées. Pour simplifier : à gauche les voitures / camionnettes / camions motos…, à droite, les transports en commun et « modes doux ».

Figure 2 : Circulation entre les deux bandes rouges. Trottoir à gauche, parapet limitant à droite

Figure 3 Source : X (ex-Twitter) détail de l’aménagement provisoire

Je lorgne sur la voie de droite. J’implore, je grogne, je supplie, mais mon motard ne m’écoute pas. Son porte-monnaie ne souhaite sans-doute pas être délesté de 135€, et qui plus est, donner de mauvaises idées n’est pas (toujours) sa spécialité. Je me retrouve donc bloquée entre deux parechocs et je ne peux rien y faire. Les minutes s’égrainent nous avançons timidement vers la sortie, profitant de la succession de feux verts, permettant aux voitures d’avancer peu à peu. Sur sa selle, mon propriétaire essaie de garder le sourire en fredonnant sous son casque, en regardant autour de lui. Dans la voiture de devant, le passager lance quelque chose par la fenêtre, avant de porter une petite boite en carton au niveau de son menton : C’était le plastique enfermant la paille de son jus de fruit. La voiture était sans-doute pleine à ras bord de détritus (non, elle ne l’était pas), ou bien n’avait-il plus de place dans ses poches ou dans l’habitacle, pour y entreposer celui-ci (mon Œil phare oui !). La voiture tourne sur la gauche rue de Castries sans clignotant, dévoilant une autre voiture noire. L’individu à l’intérieur lève la main en signe de salut. Surprise : nous sommes juste derrière le concurrent Automobiliste !

Les affaires reprennent, nous nous demandions justement ou en étaient les autres. Avançaient ils ? Etaient ils près de l’arrivée ? nous avions perdu toute notion du temps ici, bloqués dans la circulation infernale. Mes pneus me démangent, ce « quasi statisme » pèse sur mon moteur, le forçant à consommer pour rien la précieuse ressource qu’est l’essence. Voir notre concurrent juste devant nous, que nous pouvions toucher du bout du pneu, m’a redonné l’espoir d’une victoire possible (et probable, vu ce que nous avions encore à traverser). Il nous a fallu encore attendre un peu plus de 5 minutes, le temps d’atteindre la bretelle d’accès au pont Kitchener, et nous rapprocher un peu plus de la liberté.

L’accès au pont est aisé. Le pont Kitchener est séparé en 4 voies : 2 voies de circulation séparées par une voie de bus, et une dernière voie à gauche en sens inverse séparée par une ligne discontinue. Notre concurrent se glisse avec moi sur la 3^e voie, la plus à gauche, dans notre sens de circulation. Un scooter, Vespa Rouge, remonte la voie en sens inverse de l’autre côté de la ligne discontinue (135€ / -4 points) La voiture concurrente s’aperçoit qu’elle n’est pas sur la bonne voie et traverse sur la droite pour s’insérer dans le flot, tandis que je reste sur la mienne, et que je passe le feu.

Youpi ! je pose enfin les roues sur la montée de Choulans. Nous prenons la bretelle d’accès en nous glissant entre les voitures sur la droite, et la barrière sur la gauche. J’aime ma taille de guêpe ! Tandis que ma concurrente me regarde depuis le pont, des larmes coulant des phares, je rejoins l’entrée du tunnel de Fourvière. « Merci – Merci – Merci » mon motard est poli, tend la jambe ou bien remercie dans son casque lorsque la situation l’exige. L’entrée dans le tunnel est facilitée par les Lyonnais habitués au secteur : il n’est pas rare de voir les usagers laisser un intervalle suffisant pour qu’un véhicule s’insère dans la circulation : j’aime beaucoup ce civisme dans cette apparente anarchie. Je profite d’un intervalle pour me glisser dans l’interstice entre deux véhicules, puis rejoins la « Via Regina » : la fameuse « voie centrale » tant appréciée mais aussi redoutée par les motards.

La règle de l’expérimentation de l’inter-file veut que la vitesse maximum soit limitée à 50Km/h avec un différentiel de 30km/h par rapport au flux de circulation. Mon propriétaire se conforme donc à cette règle. Que de bonheur de pouvoir à nouveau passer la 2^nd puis la 3^e, j’en avais presque oublié ces sensations !

La circulation du tunnel se fluidifie, nous prenons le parti de nous insérer correctement dans la voie de gauche lorsque la vitesse des voitures dépasse les 50km/h (suivant la règle sur l’expérimentation de l’inter-files, encore une fois). Nous nous laissons ainsi porter par le flot de voitures jusqu’à la sortie du tunnel, puis suivons tranquillement les autres usagers jusqu’à Ecully, sans accroc ni ralentissements.

Rien de bien méchant à signaler. Nous passons un rond-point (dans lequel nous aurons mis une « cape d’invisibilité » 1h plus tard, juste pour surprendre une automobiliste qui ne regarde strictement rien…) Plus que quelques centaines de mètres avant l’arrivée. Le décor est planté : pas de vélo ? ils sont 2 à patienter, et personne n’est encore là. Il faut croire que nous sommes les premiers ?

Nous passons entre les poteaux délimitant le parking, afin de nous garer dans notre emplacement. Mon motard coupe le contact et enlève son casque avant de se diriger tranquillement en direction de la ligne d’arrivée : 24 minutes ! En voici le résumé :

• Office du tourisme – Moi : 3 minutes – (oui, il a marché)
• Place Bellecour – Quai Tilsitt : 4 minutes – 600m (ca fait long !)
• Quai Tilsitt – Pont Kitchener : 10 minutes – 1Km (une éternité !)
• Pont Kitchener – Arrivée : 8 minutes – 7 km

Classement d’arrivée, distance et vitesse moyenne distance/temps (et non Vmoy réelle) :

• Moto 24 Minutes 9km – 22.5 Km/h
• Auto 28 Minutes 8.5km – 18,5 Km/h
• Scooter 33 Minutes 10 km – 18.2 Km/h
• Usager TCL 34.30 Minutes 9 km – 15,9 Km/h
• Vélo 41 Minutes 8km – 11.7 Km/h

Je suis donc allé 3 fois moins vite que dans une balade « tranquille »

Je m’appelle Duckesse, je suis un Vstrom

Merci à Nicolas, le motard du test, d’avoir recueilli les propos de Duckesse ;-)